Cathédrales, Abbayes, Châteaux, Ponts…

Quand la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul s’illumine de mille chef-d’œuvres.

(Voir plus bas : Bienvenue à Troyes en Champagne, Cité du Vitrail, et petit glossaire des termes techniques autour du vitrail)

Façade de la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Troyes (114 m de long et 28,50 m de haut). Plus de 400 ans furent nécessaire pour l’ériger Elle représente l’une des cathédrales les plus célèbres pour son style gothique rayonnant et flamboyant et pour un ensemble remarquablement homogène et élégant tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Elle est reconnue également pour la qualité de ses sculptures et de ses vitraux. Photo © François Collombet
Chœur de la cathédrale de Troyes. Les vitraux du chœur, œuvre majeure de la peinture sur verre en France, tiennent la comparaison avec Chartres et Bourges dans le trio de tête des ensembles vitrés les plus vastes conservés pour la première moitié du XIIIᵉ siècle. Photo © François Collombet

Dans cette cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul, l’un des plus beaux ensembles de vitraux de France

Cette cathédrale, chef d’œuvre incontestable de l’art gothique, malmenée autant par les hommes que par la nature (le destin s’acharna véritablement sur elle), a la réputation de posséder l’un des plus beaux ensembles de vitraux de France (Quoi de plus naturel au pays des maîtres verriers, dans ce département de l’Aube en Champagne !). De la cathédrale de Troyes jusqu’aux modestes églises rurales de la région, c’est une collection de vitraux unique en Europe couvrant plus de 10 000 m2 allant du XIIe siècles à nos jours*. Ils se répartissent sur 350 édifices soit le quart du patrimoine national. Quant ’à cette lumineuse cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul, elle accapare à elle seule l’un des plus beaux ensembles de vitraux de France soit 1 500 m2 de verrières dont le très célèbre Pressoir mystique réalisé en 1625. Il est le chef d’œuvre du peintre sur verre Linard Gontier (dernier représentant de l’école troyenne de peinture sur verre, apparue à la fin du XVe siècle). De cette date jusqu’au XIXe siècle, Troyes devint un foyer artistique de premier plan d’où émergea une trentaine de peintres verriers imposant un style homogène marqué par des couleurs vives, chaudes et contrastées. Ne parle-t-on pas d’ailleurs d’une école troyenne de la peinture sur verre ?

*Cet exceptionnel patrimoine a été conservé en partie grâce au fait que le département de l’Aube en Champagne a été épargné par les bombardements dévastateurs des dernières guerres. Certaines verrières avaient d’ailleurs été déposées et mises à l’abri préventivement dans la crainte de leur destruction.

Le “Pressoir mystique” du maître verrier troyen Linard Gontier

Le « Pressoir mystique » est un thème iconographique rare dont seules deux représentations sont présentes dans l’Aube. Le sujet est tiré du livre du prophète Isaïe au chapitre 63 verset 2, « Torcular calcavi solus » (« Seul, j’ai foulé au pressoir »), allusion à la mort du Christ sur la croix. Dans le bas du vitrail, le Christ est représenté couché sous un pressoir. Le sang jaillit de son côté et coule dans un calice comme le « jus » la grappe écrasée. Il a les mains tournées vers le ciel en signe d’acceptation totale de son martyr. De la poitrine du Christ sort un cep de vigne sur les rameaux duquel sont disposés les douze apôtres à la manière des rois de l’arbre de Jessé. C’est une interprétation originale de la phrase du Christ: «Je suis la vigne, vous êtes les sarments »(Jean, 15,5-8)

Vitrail du pressoir mystique, sans doute le plus célèbre vitrail de la cathédrale de Troyes. Il est situé dans la chapelle du bas-côté nord. Créé par le maître verrier troyen Linard Gontier en 1625. Photo © François Collombet

La règle des 80 % fait de Troyes, la Cité du Vitrail

Ne dit-on pas que la France renferme 80 % des vitraux de la planète, que 80 % des vitraux français se situent au nord de la Loire, que 80 % des vitraux du nord de la Loire se trouvent en Champagne et que 80 % des vitraux de la Champagne sont dans l’Aube ! Donc, quatre vitraux sur dix à travers le monde se trouvent ici, dans l’Aube ! Il était donc tout naturel que La Cité du Vitrail s’installe à Troyes. Elle a officiellement ouvert ses portes en décembre 2022. Ce lieu d’envergure européenne occupe l’aile ouest de l’Hôtel-Dieu-le-Comte, remarquable ensemble du XVIIIe siècle, magnifiquement restauré et incluant la chapelle. Elle est constituée de quatre niveaux sur 3000 m2 avec une exposition permanente d’œuvres originales, entièrement dédiée à l’art du vitrail ; un pôle d’étude et de recherche du vitrail ; un centre d’étude pour l’observation et l’analyse des œuvres déposées ou confiées à la Cité et un atelier pédagogique ouvert à tous.

La Cité du Vitrail, au cœur de Troyes depuis le canal de Haute Seine et ses statues de bronze (ici l’envol des grues) de Tom Frantzen. Elle est installée dans l’aile ouest de l’Hôtel-Dieu-le-Comte, monument historique classé reconstruit au XVIIIe siècle, mais dont le passé hospitalier remonte au XIIe siècle, moment de sa fondation par le Comte Henri Ier de Champagne. Photo © François Collombet
Anne-Claire Garbe, conservatrice de la Cité du vitrail, ici au troisième niveau, à la galerie des vitraux devant un vitrail exceptionnel : la découverte des reliques de Saint Etienne, trésor de la cathédrale Saint-Etienne de Châlons-en-Champagne (vers 1155). Il fait partie des très rares vitraux du XIIe siècles conservés en Europe. L’état de conservation est extraordinaire (le réseau de plomb est probablement d’origine). Et que dire des verres fouettés bleus, rares et chers qui sont utilisés pour le sol et ces admirables visages et vêtements peints à l’aide de lavis, traits de grisaille très épais et repris à la pointe du pinceau. Photo © François Collombet

Une cathédrale mais aussi onze églises et une prestigieuse synagogue, la Maison Rachi

« Vous venez de Troyes, qu’y fait-on ? On y sonne », proclamait un vieux dicton. Troyes, ville aux mille églises ! On en compte encore aujourd’hui onze sans parler du temple protestant, des mosquées, de la célèbre Maison Rachi, un bâtiment à pan de bois du XVIe siècle qui abrite une synagogue (couverte de verrières) mais aussi un Institut Universitaire d’études et de recherches hébraïques ouvert à tous. Voir le musée et la salle Talmud qui met à l’honneur un immense vitrail, généalogie de Rachi pour mieux comprendre pourquoi Salomon Rachi (1040-1105) est considéré comme le plus grand commentateur de la pensée juive.

Salomon Rachi, enfant de Troyes

« Rachi est sans doute encore aujourd’hui l’un des auteurs français les plus publiés au monde ! ». Il est étonnant de penser qu’il eut pour voisin (ils étaient presque contemporains), Bernard de Clairvaux (1090-1153), le grand homme du XIIe siècle, le personnage le plus influent de la chrétienté. Ce moine rigoriste, devenu « saint Bernard »* a été aussi le défenseur des Juifs. On le voit s’élever contre les pogroms dont ils furent les victimes. Troyes abritait à cette époque une importante communauté juive. Salomon Rachi, enfant de Troyes devint à l’instar de Bernard pour les chrétiens, le Juif le plus célèbre du monde et une figure emblématique du judaïsme. La célébrité du rabbin troyen est due à son exceptionnel talent d’exégète de la Bible et du Talmud.

*On doit à Robert de Molesme, né à Troyes vers 1029 et lieu de son noviciat, d’avoir fondé l’ordre cistercien. L’abbaye de Cîteaux en Bourgogne est le berceau de ce nouvel ordre religieux qui prendra son véritable essor sous l’impulsion de Bernard de Clairvaux. Ses reliques (crâne et fémur) reposent dans la salle du trésor de la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Troyes. (Voir plus bas)

Saint-Nizier, Sainte-Madeleine, Saint-Rémy, Saint-Pantaléon…, et les autres

A l’instar de la Maison Rachi, toutes ces églises recèlent de nombreux joyaux tel le jubé de Sainte-Madeleine (très rare) ; la toiture vernissée de Saint-Nizier entre deux bras de la Seine ; Saint-Rémy (l’une des plus anciennes églises de Troyes) et sa flèche d’ardoise haute de 62 m vrillée (comptant parmi les célèbres clochers tors), ce qui permet une meilleure prise au vent, véritable prouesse architecturale au XIVe siècle ! Ajoutons la statuaire de Saint-Pantaléon qui s’enrichit après la Révolution des sculptures du XVIe siècle sauvées d’autres édifices, faisant de cette église un remarquable musée de la Statuaire religieuse champenoise (Une donatrice anonyme vient de faire un don de 350 000 € pour sa restauration !). Ne pas oublier non plus la basilique Saint-Urbain avec sa vaste verrière qui transforme son intérieur en une féérie de lumière (les vitraux du chœur sont du XIIIe siècle).

Remarquable jubé de l’église Sainte-Madeleine à Troyes (début du chantier 15010) en pierre de Tonnerre (Yonne) ; une prouesse architecturale ! Jubé provient de la formule latine : Jube, domine, me benedicere (Voulez-vous, Père, me bénir). Il permet de séparer l’espace sacré, réservé au clergé (le chœur), des fidèles. Autrefois, le jubé était polychrome. Photo © François Collombet

Dans cette cathédrale, 3 conciles et l’émergence de l’Ordre des templiers

Chrétien de Troyes (né vers 1130 et mort entre 1180 et 1190), voici le grand homme de Troyes à la portée universelle. Il a revendiqué son appartenance à cette ville, dont il n’est pas établi formellement qu’il y soit né. On doit à Chrétien de Troyes d’avoir « inventé » le roman au XIIe siècle, écrivant par choix en français plutôt qu’en latin. Il fut donc le premier romancier de l’histoire au sens moderne du terme. Il est le fondateur de la littérature arthurienne. Son influence est inversement proportionnelle à l’importance de sa production, du moins celle qui nous est parvenue : cinq récits en vers, dont deux inachevés. Qui ne connaît pas Lancelot, Perceval, Gauvain, le roi Arthur et qui n’a pas entendu parler de la quête du Graal ?

Mais la plus belle, la plus grandiose, c’est naturellement la cathédrale Saint­-Pierre-et-Saint-Paul. Saint Loup, l’un de ses premiers évêques, dut, d’après la légende, s’incliner devant Attila, chef des Huns, alors en pleine débâcle, sauvant ainsi la ville et ses habitants. Mais en 892, rien n’y fit devant la fureur des Normands qui saccagèrent et brûlèrent la ville. Une première cathédrale (à l’emplacement de l’actuelle) va s’élever vers l’an mille, déjà dédiée à saint Pierre et Saint-Paul. C’est le début de la lignée des Comtes de Champagne ; la grande époque des célèbres Foires de Champagne, Troyes étant devenue capitale de la Champagne*. Se réunirent, dans cette cathédrale au cours du XIIe siècle, trois importants conciles. C’est dans ses murs que seront approuvés et rédigés en 1129 lors du concile de Troyes, les statuts de l’Ordre des Templiers ; un Ordre, fondé par le champenois Hugues de Payns à Jérusalem 10 ans plus tôt alors qu’il était chef de la milice des pauvres chevaliers du Christ à Jérusalem. L’objectif fondateur étant de lutter contre les infidèles sur toutes les frontières de la chrétienté par des chevaliers qui conjuguaient l’abnégation monastique et l’éthique guerrière.

*Au début du deuxième millénaire, Troyes jouait un rôle majeur dans l’activation du commerce international. La route des marchands originaires de toute l’Europe et même d’au-delà les mers passait nécessairement par Troyes. Cette ville de foire se doublait alors d’une place financière de première importance.

Elle est financée par le saccage des croisades

La ville était alors réputée pour ses édifices religieux et la piété de ses comtes. Thibaud fut l’ami de Bernard de Clairvaux ; Henri II le Libéral fournit un large contingent aux différentes croisades. C’est d’ailleurs au retour de la quatrième croisade, au cours de laquelle Constantinople fut mise à sac, que l’évêque de Troyes, ayant largement bénéficié des pillages, entreprit de remplacer son ancienne cathédrale par une nouvelle. Il faut dire qu’elle avait été très endommagée lors de l’incendie de 1188 qui ravagea la ville. Les travaux commencèrent en 1208 par le chœur. A la même époque, le mariage entre Jeanne de Navarre, dernière comtesse de Champagne, et Philippe le Bel en 1284 réunit Troyes, Champagne, et Navarre à la Couronne de France. Les travaux continuaient. Les voûtes étaient élevées dès 1240, et cela malgré l’ouragan de 1228, qui arracha une partie des murs. En 1308, le chœur et ses deux étages s’achevaient avec, fait sans précédent, des parois entièrement ajourées.

Le trésor de la cathédrale

Ce que renferme aujourd’hui cette salle basse voûtée située à droite du chœur est un véritable trésor ; sans doute l’un des plus importants qu’on connaisse. Rendez-vous compte ! Constitué à partie de 1204, période des Croisades, le Trésor recèle de pièces remarquables de cette période. Parmi les plus belles, celles ramenées par Garnier de Trainel notamment, un coffret d’ivoire pourpré byzantin orné de scènes de chasse de l’empereur Constantin ou encore un vase de la Cène en porphyre vert et noir. En tout, 160 objets sacrés venant du pillage des églises et des palais de Constantinople (aujourd’hui Istanbul) lors de son sac durant la quatrième croisade ainsi qu’une splendide collection d’émaux médiévaux. Y sont conservés également le calice, la patène, la crosse et l’anneau pastoral de l’évêque fondateur de la cathédrale, monseigneur Hervé (n’étant pas prêtre, il fallut l’ordonner avant de le sacrer évêque de Troyes en 1207). Il est représenté sur un vitrail du XIIe siècle dans le chœur. C’est d’ailleurs sous l’épiscopat de Garnier de Traînel, vers 1200, à son retour de croisade que commencèrent les travaux d’édification de la nouvelle cathédrale. Après sa mort en 1205, le pape Innocent III désigna, comme nouvel évêque, le grand archidiacre Hervé.

Les reliques de Saint Bernard de Clairvaux

Mais le véritable trésor de la cathédrale n’est pas de ceux-là. C’est la châsse de saint Bernard qui abrite les reliques (son crâne et un fémur) du père fondateur de l’abbaye de Clairvaux. Une source inépuisable de richesse due à une multitude de pèlerins venue de toute l’Europe prier et se recueillir devant les ossements de celui qui fut à l’origine de l’extraordinaire expansion de l’ordre cistercien (ou ordre de Cîteaux).

Si la Révolution à l’instar des croisades a fait main basse sur ce trésor (les révolutionnaires en ont tiré quelque 800 kg d’or), il fut en partie reconstitué grâce à plusieurs dons et au mobilier liturgique découvert dans les tombeaux exhumés lors des fouilles archéologiques menées au sein de la cathédrale.

Cette châsse (avec émaux champlevés mosans) provient de l’abbaye de Nesle-la-Reposte. Elle est en partie datée du XIIe siècle. Elle abrite les crânes de saint Bernard (et son fémur) et de sainte Malachie. Photo © François Collombet

Dans le chœur, des parois entièrement ajourées

En 1308, le chœur et ses deux étages s’achevaient avec, fait sans précédent, des parois entièrement ajourées. Dès le XIVe siècle, on s’aperçut de son manque de stabilité dû à l’emploi de pierres trop fragiles pour les fondations. En 1365 s’abattit le clocher, endommageant charpentes et voûtes voisines. En 1537, voici que tombe la grande rosace. En 1700, la foudre* incendie les combles et le clocher central, haut de ses 108 mètres, qui ne fut jamais relevé. En 1841, il fallut reconstruire la façade méridionale et, bien pire, un peu plus tard, démonter l’abside pièce par pièce pour en consolider les bases !

* L’éclair du 8 octobre 1700 fit fondre les cloches, le plomb des toitures et des barlotières (traverses de fer qui maintient les vitraux dans leurs châssis).

Chœur et transept de la cathédrale de Troyes. Le triforium qui au départ devait être aveugle, est percé de vitraux. Ainsi, à l’instar de l’abbatiale Saint-Denis, Saint-Pierre-et-Saint-Paul jouira de l’un des tout premiers triforiums vitrés de l’architecture gothique, ce qui garantit à la cathédrale une luminosité exceptionnelle. Ils seront décorés par deux groupes d’artistes qui travaillent concurremment à ce projet. Les derniers vitraux sont posés vers 1240. Photo © François Collombet
Croisillon sud du transept avec sa rosace refaite au XIXe siècle (presque entièrement constituée de verre blanc). La galerie du triforium, au-dessous, est occupée par les prophètes. Cet ensemble fut exécuté entre 1841 et 1844 par le maître verrier Etienne Thévenot à l’époque où on redécouvrait l’art du vitrail complètement abandonné depuis le XVIIIe siècle. Photo © François Collombet

Ici, l’art du vitrail évolue sous nos yeux

Ce qui frappe avant tout à Troyes, ce sont les vitraux. Les plus anciens, ceux du XIIe siècle, aux traits presque naïfs, se situent dans le chœur et le déambulatoire. L’art du vitrail évolue ici sous nos yeux pour aller à des tons très purs où dominent les rouges, jusqu’au célèbre Pressoir mystique dans la quatrième chapelle du bas-côté gauche, œuvre de Linard Gontier en 1625.

Quand une cathédrale fait face aux avanies du sort

Le 21 mai 1420 est signé le traité de Troyes sous l’impulsion du duc de Bourgogne et de la reine Isabeau de Bavière. Charles VI promet le royaume avec la main de sa fille, Catherine de France, à Henri V d’Angleterre. En 1429 Jeanne d’Arc, qui conduit Charles VII à Reims pour son sacre, obtient l’allégeance de la ville au profit du futur roi. (plaque au pied de la tour nord de la cathédrale).Photo © François Collombet

Cette construction s’est étalée jusqu’au XVIIe siècle. Elle a connu de nombreux soubresauts (interruptions, destructions, changements de programmes), mais elle a néanmoins respecté un plan d’ensemble, peut-être établi dès le XIIIe siècle. Le chœur est d’abord achevé puis le transept, et enfin, au XVe siècle, la nef. Mais une partie du chœur est détruit lors d’un ouragan en 1228, et la toiture de la nef incendiée par un orage en 1389. Jadis une flèche de 108 m surmontait la croisée du transept. Elle fut emportée par une tornade en 1365, puis touchée par la foudre en 1700, après quoi elle ne fut plus reconstruite. Pour ériger la façade, le chapitre fit appel, en 1507, au célèbre architecte Martin Chambiges. Le clocher-porche (qui restait de la cathédrale de l’an mille) est alors détruit. La nouvelle façade aura trois porches et deux tours et adoptera un décor caractéristique du XVIe siècle. La tour nord, dite Saint-Pierre, est achevée en 1634. La tour sud, dédiée à saint Paul, ne verra jamais le jour par manque d’argent. Selon une autre version, la prudence aurait prévalu. Le sol y est marécageux (la Seine n’est pas loin). Il menaçait de s’enfoncer et de détruire une partie du bâtiment.

L’œuvre des Chambiges

Au début du XVIe siècle, soit trois siècles après le début des travaux, la façade est enfin mise en chantier sur des plans de Martin Chambiges. II est alors au faîte de sa renommée. Il vient d’achever les magnifiques portails flamboyants de Beauvais. Il a également travaillé à Sens. Lui succèdent son propre fils Pierre Chambiges et son gendre, Jean de Damas. Ils réalisent un chef-d’œuvre : une façade flamboyante en trois parties dans sa largeur, avec une hauteur à trois niveaux : les portails, la rose et les tours. La décoration sculptée a malheureusement disparu à la Révolution. Mais on peut imaginer combien elle devait être exceptionnelle lorsque les niches, le trumeau du grand portail, le grand gâble et le tympan portaient encore statues et bas-reliefs réalisés par des artistes champenois. Privée également de sa statuaire, la façade nord, qu’on qualifiait de Beau Portail pour l’extrême richesse de ses décorations.

Cette façade flamboyante en trois parties de la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Troyes est l’œuvre des Chambige. Photo © François Collombet

Elle est déchristianisée à la Révolution

La cathédrale ne sortit pas indemne du vandalisme révolutionnaire. Si toutes les grandes statues des portails furent fracassés, beaucoup de vitraux subirent le même sort. Le trésor fut fondu et l’édifice, ce qui le sauva, fut transformé en Temple de l’Abondance. Sa restauration fut l’œuvre d’Eugène Millet élève de Viollet-le-Duc à l’École des Beaux-arts. Dès 1840, les premiers travaux révèlent l’extrême fragilité de l’édifice. Ce sont le chevet et le transept qui furent reconstruits en premier. De 1849 à 1866, les piliers du chœur sont repris en sous œuvre. Quant aux vitraux, un grand programme de restauration avait débuté dès 1837.

L’incroyable travail consacré par le peintre verrier Vincent-Larcher à la cathédrale

La restauration des vitraux sont confiées aux ateliers Vincent-Feste, Hugot, Martin-Hermanowska. Mais on doit la majorité des reconstitutions à Vincent-Larcher, peintre verrier troyen. Ce dernier est sans doute le plus prolifique de cette période avec plus de 200 églises dans lesquelles il a travaillé. Durant près de 40 ans au service du chantier de la cathédrale, Vincent-Larcher étudia, copia et restaura les vitraux du chœur (baies hautes et basses) et de la nef. Pourtant, le chef-d’œuvre de Louis Germain Vincent-Larcher se niche non dans la cathédrale mais dans l’église Saint-Rémy de Troyes avec une superbe Proclamation de saint Joseph patron de l’Église universelle par le Pape, datée de 1874.

Portrait d’un très grand artiste

Vincent-Larcher (1816-1894) est un peintre verrier troyen qui traversa tout le XIXe siècle. Simple vitrier de l’Yonne (à Sens), il se passionna très tôt pour la splendeur des vitraux du Moyen Âge dont il souhaita retrouver les secrets. Le XIXe siècle fut riche de redécouverte, de création et de prouesses techniques. En témoignent les résultats du récent inventaire des vitraux contemporains de l’Aube (XIXe-XXIe siècles) qui mettent en lumière le travail de Louis Germain Vincent-Larcher. C’est dans la capitale de l’Aube en Champagne qu’il installa son atelier de verrerie. Aujourd’hui, il est possible d’admirer ses œuvres dans les édifices religieux de la région. Le style et les techniques utilisées par Vincent-Larcher en ont fait un des artistes emblématiques de l’Aube.

Vitrail de Vincent-Larcher (1874), église de Saint-Rémy de Troyes : Proclamation de saint Joseph patron de l’Église universelle par le Pape Pie IX. Sans doute le vitrail le plus connu de Louis Germain Vincent-Larcher (1816-1894) DR

Une cathédrale en constante restauration

Heureusement, la cathédrale n’eut pas à subir trop de dommages lors des deux dernières guerres mondiales. A deux reprises, les vitraux furent déposés et remontés par la suite. Depuis, les campagnes de restauration n’ont pas cessé. Le 15 novembre 2022, la ministre de la Culture, en déplacement à Troyes, se rendait à la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul où le chantier de la tour sud venait de s’achever. Enfin ! Cette façade flamboyante retrouvait la splendeur que lui avait insufflée Martin Chambiges au XVIe siècle. Dernier éclat pour cette cathédrale, chef d’œuvre incontestable de l’art gothique !

En 2011, Christiane Boone créait Les Femmes au tombeau, un ensemble sculpté en terre cuite, reprenant le thème de la résurrection ou du passage. Photo © François Collombet

Bienvenue à Troyes en Champagne, Cité du Vitrail

Troyes, la ville des maisons à pans de bois et du vitrail

Qui se promène dans les rues ne peut que constater l’un des trésors de la cité, son incroyable collection de maisons à pans de bois héritée du Moyen-Âge et de la Renaissance. La cité possède en effet l’une des plus belles et des plus riches collections de maisons de ce type, dites aussi « à colombage ».

Troyes, Cité du Vitrail, cité radieuse

Troyes, quel programme ! Evidemment l’Aube nous offre aussi le Musée Camille-Claudel à Nogent-sur-Seine, la Maison et Atelier d’Auguste Renoir à Essoyes, l’abbaye de Clairvaux ou bien encore, ici même, la Maison de Rachi ou le Musée d’Art Moderne (à l’emplacement de l’ancien palais épiscopal). Mais, Troyes au coeur d’un département qui réunit une exceptionnelle collection de vitraux du XIIe siècle à nos jours* (répartie dans 350 édifices) est unique en Europe par l’abondance et la très grande qualité de ceux-ci. L’idée d’y instaurer une structure dédiée à l’art du vitrail était alors évidente. Le choix du lieu pour cette Cité du Vitrail a fait consensus : l’Hôtel-Dieu-le-Comte, remarquable ensemble du XVIIIe siècle situé en plein cœur de Troyes.

*L’âge d’or se situe au sortir de la guerre de Cent Ans entre 1480 et 1550

Découvrir la Cité du Vitrail avec Anne-Claire Garbe, sa conservatrice

“Les verrières sont les écritures divines qui repoussent le vent et la pluie, c’est à dire qui tiennent éloigné ce qui est nocif, tandis qu’elles laissent passer la clarté du vrai soleil, c’est à dire de Dieu dans l’église”

Guillaume Durand, évêque de Mende (fin du XIIIe siècle).

Des vitraux à hauteur des yeux. Alors que les vitraux ne sont souvent visibles qu’en contre-plongée, ils sont exposés ici à hauteur des yeux. Sur 3000 m2 (incluant l’ancienne chapelle), la collection déroule l’évolution des styles qui ont affecté cet art très représentatif du patrimoine troyen et aubois. Les œuvres originales qui sont exposées sont régulièrement renouvelées au gré des prêts. Le vitrail civil côtoie le vitrail religieux, le vitrail moderne le vitrail ancien, de même que le vitrail aubois laisse une place aux œuvres originaires d’autres départements ou régions.

Le défi de la lumière. Le plus difficile dit sa conservatrice est d’éclairer le vitrail : c’est un matériau vibrant, évolutif selon la lumière du jour. L’éclairage des vitraux a été l’un des plus grands défis scénographiques. Selon le cas de figure, il faut contrôler et adapter la source lumineuse qui vient traverser le vitrail, pour faire pleinement ressortir toutes les nuances et variations du verre et du motif coloré.

En guise d’accueil, le lustre monumental en verre du grand escalier

Ce lustre monumental, fil conducteur de la Cité du Vitrail est l’œuvre d’Alain Vinum, maître verrier troyen. Il est composé de 24 manchons de verre (jaune, rouge-orangé et brun) ; des bouteilles en verre soufflées à la bouche. Ces manchons sont en fait habituellement utilisés comme matière première du maître verrier, une fois transformés en feuille de verre. Photo © François Collombet

Au dernier étage (là où commence la visite), début d’un parcours d’initiation au vitrail

Ici, sous les combles du troisième étage, sont abordées les grandes étapes de création d’un vitrail depuis la commande jusqu’à la pose dans l’édifice. Quelles techniques sont utilisées ? 1/La technique du blaireauté qui consiste à poser de la matière avec une brosse large. 2/La technique du putoisé où le dépôt de la matière se fera par tapotement avec une brosse ronde à poils durs pour donner un aspect granuleux. 3/La technique de l’enlevé, c’est à dire le retrait de matière pour mieux faire pénétrer la lumière. Autre étape, comprendre le vitrail. Et là, c’est un parcours chronologique, du IVe siècle à nos jours, pour mieux saisir cet art très particulier du vitrail.

Avec Anne-Claire Garbe, conservatrice de la Cité du Vitrail, on commence la visite par le dernier étage (sous les combles), qui par sa configuration ne peut recevoir que de petits vitraux. Place est donnée à l’information et à la pédagogie : comment mieux comprendre l’histoire du vitrail, les styles, l’iconographie et la technique du vitrail. Photo © François Collombet
Ici on se pose devant cette verrière (1520) de la vie de Saint Gilles qui évoque la scène de la résurrection de Clotaire, fils du roi Clovis. Elle provient de l’église Saint-Nizier de Troyes. Verre teinté dans la masse, usage de la grisaille et du jaune d’argent, verres plaqués et gravés, montages en chef-d’œuvre…préciserait un(e) spécialiste. Le panneau de gauche représente la messe de Saint Gilles et celui de droite, quand le saint se voit remettre deux portes en bois de cyprès, offertes par le pape pour son monastère. Photo © François Collombet
Toujours à cet étage, espace dédié à la pédagogie. Comment donner les meilleurs clés pour mieux comprendre l’histoire, les styles, l’iconographie, la technique du vitrail ? Photo © François Collombet

La galerie des vitraux, 26 vitraux majeurs expliqués

Au niveau 3, une immense galerie baignée de lumière. On y trouve 26 vitraux dont de très grands formats. On passe du vitrail traditionnel à la dalle de verre jusqu’au verre thermoformé ou gravé. Tous les styles sont représentés pour une déambulation à travers les siècles (le choix de l’accrochage se fait plutôt en fonction de l’esthétique).

Verrière de la Passion, début du XVIe siècle provenant de l’église Sainte-Croix à Provins : verre et plomb, peinture à la grisaille, sanguine et jaune d’argent. Cette verrière monumentale est présentée dans son ensemble pour la première fois depuis sa dépose en 1975. Elle retrace la Passion du Christ, de son arrestation jusqu’à sa mort sur la croix. Photo © François Collombet

L’histoire de la céramique, du palais du Trocadéro à la Cité du Vitrail à Troyes

L’histoire de la céramique (1878) de Louis-Charles-Auguste Steinheil (1814-1885) : verre et plomb, émaux, peinture à la grisaille. Vitrail restauré par l’Atelier MurAnèse (92) en 2022. Photo © François Collombet

La seule baie à avoir été démontée puis conservée

Redécouverte en 1997, cette verrière du palais du Trocadéro est présentée au public pour la première fois depuis son démontage entre 1935 et 1937. Lors de son édification pour l’Exposition universelle de 1878, quatorze baies du palais du Trocadéro furent pourvues de vitraux représentant l’histoire des arts de l’industrie. La verrière de l’histoire de la céramique fut la seule à être démontée puis conservée lors de la destruction du palais décidée en 1935 pour faire place à un nouveau palais devant accueillir l’exposition internationale de 1937.

De René Lalique (1926) à Alain Vinum (1994)

De cet “Ange” émane une lumière chaude et tamisée, propre à créer une atmosphère de recueillement

Au sortir de la Première Guerre mondiale, un vaste projet social est lancé pour la création d’une cité-jardin à la périphérie de Reims : la Cité-Jardin du Chemin-Vert. Une église dédiée à saint Nicaise est édifiée au cœur de ce « village ». Sa décoration, s’inscrivant dans le renouveau de l’Art sacré est confiée aux plus grands artistes de l’époque dont René Lalique, natif de Aÿ (Marne).

Une technique propre à René Lalique

Pour les vitraux, René Lalique va développer une technique novatrice : le verre pressé-moulé. Il est coulé dans un moule préalablement sculpté et passé sous une presse pour imprimer le motif dans l’épaisseur de la matière. La forme et les nuances de couleurs de cet ange agenouillé résultent donc uniquement des différences d’épaisseur du verre. Le contraste entre l’ange et le fond est accentué par un traitement dépoli du verre sur les parties en creux, faisant ressortir la transparence du vêtement ou le moelleux des plumes de l’aile qui retombent sur la jambe. De là provient la couleur jaune ambrée qui en émane et qui diffuse une lumière chaude et tamisée, propre à créer une atmosphère de recueillement. Lalique reprit cette technique par la suite pour réaliser de grands ensembles comme les portes du palais du prince impérial du japon, à Tokyo en 1932.

Pourquoi Borobodur ?

Alain Vinum, artiste complet, créateur, décorateur et maître verrier centre beaucoup son activité dans l’Aube. En 1992, il se rend en Indonésie pour participer à la création d’un spectacle d’illuminations sur le site du temple bouddhique de Borobudur. II y découvre les nombreux reliefs qui couvrent le temple et en photographie un détail représentant trois tentatrices. De retour en France, il crée cette réinterprétation en vitrail. Trois figures dont les visages sont laissés vides donnant libre cours à l’imagination. Sont-ce les trois tentatrices, les trois Grâces, les trois Parques ou… ?

La technique d’Alain Vinum

Il a eu recours à des techniques classiques telles que le verre émaillé, la peinture au jaune d’argent et le fusing (superposition de plaques de verre portées à leur point de fusion pour obtenir une pièce homogène). Mais ces techniques sont ici modifiées : les figures noires ont été obtenues en disposant de l’aluminium entre les plaques de verre avant la cuisson. En partie basse les taches jaunes ont été obtenues à l’aide d’un mélange de jaune d’argent et d’essence. L’essence a pour propriété de ne pas se mélanger avec l’émail : cette propriété est à l’origine des liserés bleu foncé qui entourent le jaune d’argent.

(Source : livret des œuvres de la Galerie des Vitraux).

L’étonnant trésor de la Cité du Vitrail

Ah, cette salle du trésor ! Une petite salle plongée dans une pénombre pour mieux le faire surgir dans une délicate lumière. Il est protégé comme un convalescent trop fragile, se tenant légèrement incliné dans sa vitrine qui lui sert d’écrin. Voici donc le trésor ! Un panneau de petite dimension chef-d’œuvre le plus ancien de la collection de la Cité du Vitrail, un vitrail troyen de la fin du XIIe siècle, miraculeusement retrouvé en 2018.

Transfiguration du Christ, atelier troyen, provenant de la cathédrale romane de Troyes, vers 1170-80, coll. Cité du Vitrail. Photo © François Collombet

Disparu depuis le début du XXe siècle

Il représente la Transfiguration du Christ entouré de deux apôtres. C’est un vitrail troyen datant de la fin du XIIe siècle, disparu depuis le début du XXe siècle. Il est exposé pour la première fois dans cette salle du trésor qui lui est entièrement consacrée. Oui, il est bien authentique, ce panneau de vitrail du XIIe siècle créé pour la cathédrale romane de Troyes ou pour la collégiale Saint-Étienne, fondée par Henri Ier le Libéral, comte de Champagne. Il faisait partie d’un ensemble de verrières disparues aujourd’hui Et un véritable miracle le fit resurgir lors d’une vente publique. Il fut alors acquis par le Conseil départemental de l’Aube en novembre 2018. Il vient d’être restauré par la Manufacture Vincent-Petit (Troyes).

Ce vortex jaune d’argent sur grisaille bleutée occupant l’oculus de la chapelle de l’Hôtel-Dieu-le-Comte !

Chapelle de l’Hôtel-Dieu-le-Comte. L’œil est irrémédiablement attiré par cet oculus, première création contemporaine pour la chapelle : verrière en grisaille et jaune d’argent, œuvre originale et don de l’artiste Fabienne Verdier. Oculus par Fabienne Verdier (Manufacture Vincent-Petit) 2021 (180 cm de diamètre). Photo © François Collombet

Une chapelle, oui mais quelle chapelle ! Bien sûr, on remarque trois des six grandes baies. Elles accueillent des verrières monumentales en lumière naturelle : deux lancettes (chacune dans une baie) dont celle de Jacques Le Chevallier représentant Saint Marcel et Sainte Geneviève, créés en 1937 et destinés aux fenêtres hautes de la nef de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Mais l’œil surtout, est attiré vers le haut, vers l’oculus, vers une création* de l’artiste peintre de renommée internationale Fabienne Verdier. Un incroyable vortex exécuté par la Manufacture Vincent-Petit, en jaune d’argent surgissant d’une grisaille bleutée, sorte d’immense calligraphie qui signe l’admirable décor de cette chapelle.

*Cette création rappelle les verrières en grisaille et jaune d’argent qui se développent au milieu du XVIe siècle, notamment dans l’Aube.

Une apothicairerie parmi les plus belles de France

Il serait dommage de quitter cette Cité du Vitrail sans un passage par l’apothicairerie de l’Hôtel-Dieu. Cette grande salle qui conserve une collection exceptionnelle de pots de faïence et boîtes pharmaceutiques en bois peint du XVIe au XIXe siècle.

Petit glossaire pour tout comprendre sur l’art du vitrail

Le Martyre de Saint Vincent (1140-1144) : verre de couleur, grisaille, plomb (Prêt de l’Etat à la Cité du Vitrail à Troyes). A la suite d’une confusion avec le martyre de saint Laurent, saint Vincent est représenté sur un gril, et non sur un bûcher. Les bourreaux le maintiennent à l’aide de fourches. Un autre attise le feu avec un soufflet. C’est une œuvre aux coloris somptueux où les oranges, les rouges, les jaunes se détachent sur fond bleu. Photo © François Collombet

La baie : ouverture pratiquée dans un mur, pouvant accueillir un vitrail.

La verrière est un vitrage de grande dimension faisant face de mur ou bien une grande ouverture parée de vitraux.

Lancette : ouverture allongée verticalement, surmontée d’un arc.

Panneau : assemblage de verre et de plomb qui ne dépasse en général par mètre carré. Il faut plusieurs panneaux pour composer une baie.

Médaillon : petits vitraux en assemblage de médaillons carrés ou circulaires.

Rosace : baie dont le tour en pierre est circulaire et forme, à l’intérieur, une rose. Les plus grandes rosaces se trouvent le plus souvent dans les cathédrales, sur les façades nord, sud et ouest.

Verre en grisaille : la grisaille est une technique de peinture sur verre. Elle consiste à utiliser de la poudre de verre qui est mélangée à différents oxydes métalliques selon la couleur souhaitée. Elle est déposée à la surface du verre déjà cuit. L’ensemble est ensuite recuit à une température plus basse pour fixer les pigments de couleur.

Jaune d’argent : ce procédé est obtenu par application de sels d’argent à la surface du verre qui deviennent jaunes à la cuisson.

Sanguine sur verre : grisaille sur verre dont les teintes varient des bruns chauds au roux très vif.

Monture en chef-d’œuvre : ce procédé, très délicat, permet d’intégrer de nouvelles pièces de verre au sein d’une autre plaque de verre, évidée pour l’occasion. II est utilisé pour introduire des petits éléments que l’on souhaite mettre en valeur. C’était un moyen pour les maîtres-verriers de montrer toute leur virtuosité, car il fallait prendre garde à ne pas casser la pièce de verre existante.

Verre gravé : deux plaques de verre de couleurs différentes sont cuites ensemble, l’une sur l’autre. Le maître-verrier ôte simplement la pellicule de couleur à la surface de la pièce de verre, laissant apparaître la couleur qui se trouve en-dessous.

Verre vénitien : cette technique consiste à disposer des fils de verre de couleurs différentes les uns à côté des autres. Cet assemblage subit une seconde cuisson, de manière à former une plaque de verre à rayures multicolores.

Verre aspergé : pour représenter de petits détails, telles les blessures, des gouttes de verre coloré en fusion sont projetées sur la pièce de verre déjà réalisée.

En épilogue, retour à cette église de la Madeleine, la plus ancienne église de Troyes dont le décor vitré a servi de modèle pour de nombreuses églises champenoises et bourguignonnes et, un surprenant Saint Sébastien privé de ses flèches.

Quand la création du monde apparaît sur une verrière de l’église de la Madeleine

Eglise de la Madeleine, La Création des astres, verrière de l’Histoire du Salut (vers 1500) Photo © François Collombet

Sur cette verrière, pas moins que la Création du monde jusqu’à sa Rédemption ! Elle a certainement été pensée par un ecclésiastique en raison de la précision des épisodes. Comme souvent, le couple de donateurs figure sur le vitrail, ici placé dans le tympan, ce qui est peu fréquent. Le peintre verrier a réalisé un montage en chef-d’œuvre dans le panneau présentant la création des astres en intégrant des pièces de verre au sein d’une autre plaque de verre.

Saint Sébastien (vers 1530), sculpture de pierre polychrome dans l’église de la Madeleine à Troyes Photo © François Collombet

Un Saint Sébastien, sculpture de pierre polychrome sans doute plus flamboyant que Sainte Marthe ou Saint Robert, ses voisins !

L’église de la Madeleine abrite plusieurs sculptures témoignant du “Beau XVIe siècle” troyen*. Parmi elles, Sainte Marthe (vers 1510-1520), une sculpture très réaliste. Marthe est la sœur de Lazare et de Marie-Madeleine ce qui pourrait expliquer sa présence dans l’église. Cette sculpture est un chef-d’œuvre de la statuaire champenoise de la Renaissance. Saint Robert (début du XVIe siècle) est une statue en bois, jadis polychrome. Il porte les maquettes des abbayes de Molesmes et de Cîteaux dont il fut fondateur.

Enfin, un Saint Sébastien, souffrant mais en extase. il faut l’imaginer plus flamboyant encore lorsqu’il était recouvert de feuilles d’or (collier, cheveux et linge). Son culte était très répandu au Moyen Âge. Officier martyrisé à Rome en raison de sa foi, il fut percé de flèches. On lui attribuait alors le pouvoir d’éradiquer les épidémies de peste, selon la croyance biblique assimilant la maladie à des flèches envoyées par Dieux (!). Cette sculpture de pierre polychrome (classée Monument Historique en 1908) est réaliste dans le traitement de l’anatomie. Les flèches devaient être placées dans les plaies. Il porte le collier de l’ordre royal de saint Michel composé de coquilles.

*« Le Beau XVIe siècle » fut une exposition présentant des sculptures religieuses des XVe et XVIe siècles issues des ateliers de sculpture champenois et venant de différentes églises de la région mais également de différents musées comme Le Louvre ou le Metropolitan Museum of Art de New York. Elle s’était tenue en 2009 en l’église Saint-Jean-du-Marché de Troyes.

Y aurait-il des bulles dans le verre du vitrail ?

Vitrail Buveur de Champagne par Henri de Faucigny-Lucinge, 1874
Ce champagne spécial Cuvée Cité du Vitrail provient de la Côte des Bar et de la coopérative Gaston Cheq, une coopérative qui fédère aujourd’hui 80 vignerons exploitant 180 ha. Photo © François Collombet

Abbaye de Cîteaux (Bourgogne), berceau de l’ordre cistercien. Plus de 9 siècles d’Histoire – Dico du patrimoine (dico-du-patrimoine.fr)

Champagne Drappier à Urville. Vous avez dit cistercien ! (dico-du-vin.com)