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La cathédrale de Reims au printemps. Photo © François Collombet

Cathédrale Notre-Dame de Reims, royale de tous les pores de ses pierres ! Cette cathédrale qui fut si longtemps corsetée dans une gangue d’échafaudages, n’en finit pas de fêter sa beauté retrouvée. En 2011, elle célébrait le 800e anniversaire de sa fondation, le 20e anniversaire de son inscription au patrimoine mondial de l’Unesco (1991) et un an plus tard, le 50e anniversaire de la réconciliation franco-allemande. Son unité de style, sa luminosité et sa statuaire* en font le chef d’oeuvre le plus accompli de l’art gothique en Europe. Mais sait-on qu’elle comporte également une prouesse architecturale du XXe siècle : une charpente en béton armé élaborée par l’architecte Henri Deneux (voir plus bas), ainsi que des vitraux contemporains dessinés par Marc Chagall (1974) et Imi Knoebel (2011 et 2015).

*Avec 2303 statues, la cathédrale de Reims présente le décor sculpté le plus important d’Europe.

La cathédrale de Reims marque l’apogée du gothique classique (1190-1230). L’élégance de cette façade provient de la prédominance des lignes verticales. Tout, les tympans, les gâbles et les pinacles aspirent le regard vers les hauteurs.
La cathédrale de Reims représente le sommet du gothique classique (1190-1230). La genèse de la cathédrale gothique date de 1211, succédant à cinq précédentes cathédrales, érigées au même emplacement, sur les ruines de thermes gallo-romains. La grâce de sa façade émane de la dominance des lignes verticales. Les tympans, les gâbles et les pinacles élèvent le regard vers le ciel. (Photo J-L B)

Royale de tous les pores de ses pierres

Ce vivat rex in aeternum, que scandait la foule lors du sacre des rois, résonnerait-il aujourd’hui en l’honneur de cette cathédrale royale dont la façade et les portails réapparaissent année après année aussi purs qu’au premier jour ? Après une si longue convalescence, elle domine souveraine, de ses 83 mètres de haut et ses 34 mètres de large, la capitale de la Champagne. Pourtant, celle qui eut le privilège de sacrer 32 rois de France fut la victime du destin et de la négligence humaine. Elle fut souvent abandonnée aux incendies et à la ruine. Six architectes qui veillèrent à son édification, à sa reconstruction ou à sa restauration ont inscrit leurs noms dans la mémoire de ses pierres jusqu’au dernier, mort presque oublié en 1969, à qui l’on doit le miracle de sa résurrection. Aujourd’hui, c’est une cathédrale à hauteur d’ange qui s’élève devant nous : des anges de pierre au sourire plein d’humanité venus du Moyen Âge qui nous bouleverse encore au-delà des siècles.

Cathédrale royale ! De tous les pores de ses pierres, Reims exhale l’Histoire de France. Alors comment oublier le côté monument national quand tant de rois y furent sacrés ? Les gigantesques effigies des rois d’Israël qui, au troisième étage, barrent la grandiose façade, sont là pour nous le rappeler. Prééminence unique, ils sont placés au-dessus des évêques, qui habituellement, se positionnent toujours au-dessus des rois.

La galerie des Rois se situe au-dessus de la rosace et de la scène décrivant le combat de David et Goliath. Elle est composée de 56 statues dont chacune mesure 4,50 m de haut et pèse 6 à 7 tonnes (au centre, le baptême de Clovis). Ils tiennent les attributs traditionnels, couronnes, sceptres, verges, gants. Seule la tour sud possède encore des statues anciennes. (La galerie de 56 monarques se poursuit jusqu’aux croisillons nord et sud). Photo © François Collombet

Des anges à l’expression indicible de bonheur

Combien sont-ils ces personnages sacrés, ces personnages de légende et tous les autres, à tenir leur place, humble ou prestigieuse, dans la cohorte des statues ? On en aurait dénombré 2300, anges aux ailes déployées, gardiens oubliés à l’expression indicible de bonheur, ébauchant l’amorce d’un sourire. Car c’est ici à Reims que, pour la première fois, hommes et anges de pierre ont souri aux hommes de chair. Des joues, des lèvres dessinées pour le sourire. Voilà donc le grand message de Reims, le défi que lançaient, il y a près de huit siècles, les sculpteurs gothiques : portraiturer la joie. Une joie communicative qui se répandit à travers toute l’Europe comme une traînée de poudre. Le sourire de Reims, le sourire de l’ange qui, en guise de bienvenue, accueille ses visiteurs au portail gauche (nord) à l’entrée de la cathédrale. À quoi doit- il sa célébrité ? À cette esquisse d’homme entre l’enfance et l’adolescence, à cette immatérialité des traits qui touchent au surnaturel ? Au fait que les soldats de la guerre de 1914-1918, constatant qu’il avait survécu, ont parlé partout de symbole de l’espoir sans cesse renaissant ? Mais regardez celle par qui tout fut possible, la Vierge portant l’Enfant dans ses bras, sculptée au trumeau du portail central, celle qui vit passer tant de processions royales, de Saint Louis à Charles X. La cathédrale de Reims est un hymne à sa gloire. II suffit de lever les yeux : c’est elle encore qui domine le portail central sur un pied d’égalité avec son fils. Ce bas-relief (le couronnement de la Vierge) est une véritable scène d’apothéose, démontrant l’extraordinaire attachement des chrétiens du XIIIe siècle à la mère du Christ.

Cathédrale de Reims, façade principale, portail nord (Ébrasement gauche) : de gauche à droite, 1/Sainte Hélène, mère de l’empereur Constantin (ou Sainte Céline de Laon, mère de Saint Remi) ; 2/Ange tenant un encensoir ; 3/Saint Nicaise représenté avec une partie du crane enlevée (ou Albert de Louvain évêque de Liège) ; 4/Ange au sourire ou “Sourire de Reims”. Photo © François Collombet
Cathédrale de Reims, façade principale, portail nord (Ébrasement gauche) : de gauche à droite, 1/Sainte Hélène, mère de l'empereur Constantin (ou Sainte Céline de Laon, mère de Saint Remi) ; 2/Ange tenant un encensoir ; 3/Saint Nicaise représenté avec une partie du crane enlevée (ou Albert de Louvain évêque de Liège) ; 4/Ange au sourire ou "Sourire de Reims" (Photo FC)
Photo © François Collombet

 

Le sourire de l'ange qui, en guise de bienvenue, accueille ses visiteurs au portail gauche (nord) à l'entrée de la cathédrale (Photo FC)
Le sourire de l’ange qui, en guise de bienvenue, accueille ses visiteurs au portail gauche (nord) à l’entrée de la cathédrale. Photo © François Collombet
L’ange et la Vierge constituent le groupe de l’annonciation de l’ébrasement du portail central. La tête de l’ange de l’annonciation ressemble pour beaucoup à la tête de l’ange au sourire qui se trouve au portail nord.
L’ange et la Vierge constituent le groupe de l’annonciation de l’ébrasement du portail central. La tête de l’ange de l’annonciation ressemble pour beaucoup à la tête de l’ange au sourire qui se trouve au portail nord. Photo © François Collombet

Incendiée volontairement pour reconstruire en plus beau

Une cathédrale fut construite vers l’an 820, presque aussi grande que la cathédrale actuelle. Fait quasi unique, on connaît le nom du premier architecte, un serf nommé Rumald, habile dans l’art de l’architecture. Un chroniqueur rémois Flodard, a loué les voûtes et murailles décorées de peinture et de dorures éclatantes, les pavés de marbre et de mosaïque, les verrières de couleur, les tapisseries et les riches vases en or et en argent. Avec tours, tourelles et créneaux, elle avait allure de forteresse. On pense que le petit portail roman du transept nord de la cathédrale actuelle est un vestige de cette cathédrale carolingienne. Cet édifice est terminé vers 860 par un archevêque auquel Reims doit d’être devenue ville du sacre, Hincmar. Plusieurs fois reconstruite, la cathédrale nous emmène jusqu’au XIIIe siècle, où elle fut, dit-on, volontairement incendiée en 1210 par l’archevêque Albéric de Humbert. Le seul moyen qu’il eut sans doute pour reconstruire en plus beau et surtout en plus grandiose. La reconstruction coïncide avec la victoire de Philippe Auguste à Bouvines en 1214. C’est dans un climat social tendu entre l’archevêque et la commune, soutenue par le roi, que la première pierre avait été posée le 6 mai 1211. Trente ans plus tard, le chœur et les trois premières travées de la nef sont achevés, et le 7 septembre 1241 le chapitre y fait son entrée solennelle.

Le nom de ses architectes gravés sur le labyrinthe

Le nom des architectes ? Quatre d’entre eux furent gravés sur une plaque de cuivre incrustée dans une dalle du labyrinthe*, que le chapitre fit détruire en 1779, sous le prétexte futile que les enfants s’y amusaient et troublaient l’ordre des cérémonies. II n’en reste aujourd’hui que de rares dessins et descriptifs des XVIe et XVIIIe siècles grâce auxquels on sait que, dans chacun des quatre angles, était dessinée une effigie assortie d’un nom de Maître d’œuvre suivi de la tâche effectuée. Se succédèrent donc Jean d’Orbais qui commença la coiffe de l’église, Jean le Loup qui initia les portaux, Gaucher de Reims qui ouvra aux voussures et portaux, Bernard de Soissons qui fit cinq voûtes et ouvra la rosace, vers 1280. On connaît par ailleurs le nom du dernier architecte, Robert de Coucy, mort en 1311, qui construisit les quatre dernières travées. À ces noms médiévaux, il conviendrait peut-être d’associer celui des Simon, une dynastie de verriers encore en activité aujourd’hui et dont la présence à Reims est attestée depuis 1640.

* Le labyrinthe détruit par les chanoines se situait entre la 3e et la 5e travée. Les personnages aux angles représentaient les architectes de la  cathédrale : Jean d’Orbais, Jean Le Loup, Gaucher de Reims et Bernard de Soissons. On ne connait pas l’identité de celui qui était au milieu.

L’argent est détourné, la révolte gronde

Au XIIIe siècle, les choses vont de mal en pis. Les bourgeois de Reims se révoltent. Craignent-ils que l’archevêque ne détourne l’argent qu’ils ont prêté à l’œuvre de la cathédrale ? Le soupçonnent-ils de profiter de ces fonds pour en toucher indûment des intérêts, pratique pourtant interdite aux chrétiens ? Alors la révolte gronde. On assiège l’archevêché situé près de la porte de Mars. Les chanoines du chapitre ont déjà pris la fuite. L’archevêque est à l’extérieur de la ville. Les bourgeois fortifient Reims, utilisant tout ce qui leur tombe sous la main : pierres tombales, matériaux stockés pour la cathédrale. Mais le roi hésite à les soutenir. La ville est frappée d’interdit : plus de sacrements. On évalue les dégâts à deux mille florins. Échevins et meneurs sont jetés en prison ou contraints à l’exil. Leurs maisons sont détruites. Il faudra attendre la mort de l’archevêque Henri de Braine, en 1240, pour qu’une absolution soit enfin accordée à la ville.

Étonnante envolée des lignes ascensionnelles

Une nef de 138 mètres de long, 38 mètres de haut pour 15 mètres de large. Elle tient en partie sa beauté de l’étonnante envolée des lignes ascensionnelles. Elle est constituée par de grandes arcades, un triforium aveugle et des fenêtres hautes à deux lancettes surmontées d’une rose à six lobes. Photo © François Collombet

Deux siècles et demi sont nécessaires pour mener à bien cet immense projet. Malgré l’étalement dans le temps, Reims possède une exceptionnelle unité de style. Son architecture est pourtant marquée par l’innovation et en particulier par ses proportions, qui font qu’elle n’est dépassée en taille que par la cathédrale d’Amiens. Une nef de 138 mètres de long, 38 mètres de haut pour 15 mètres de large. Elle tient en partie sa beauté de l’étonnante envolée des lignes ascensionnelles. Les piliers de la nef, qui auraient pu être comme partout octogonaux ou cylindriques, sont ici un très innovant assemblage de colonnettes rondes. On aménage l’espace intérieur de manière différente de partout ailleurs : cinq chapelles rayonnantes incrustées en demi-cercle sont prolongées par les deux travées adjacentes du chœur, suivies des deux travées de la nef. On ajoure les tympans des portails, remplacés pour la première fois par des roses, ce qui allège considérablement la façade. Autre chef-d’œuvre, le revers de la façade occidentale : une dentelle de sculpture ! Tout au-dessus, une admirable rose de plus de 12 m de diamètre représente la Vierge entourée d’anges, de patriarches et de rois. Juste en dessous, un triforium s’ouvre sur la nef par des arcades. Tout ici semble marqué par la grandeur, la simplicité, par une clarté harmonieuse.

Reims Grande rose de la façade occidentale (seconde moitié du XIIIe sècle) de 12,50 m de diamètre. En dessous de la galerie vitrée du triforium formée de 9 lancettes, la Petite rose, oeuvre du maître verrier Jacques Simon (1937), de 6 m de diamètre. Photo © François Collombet
Le 19 septembre 1914, la tour nord couverte d'échafaudages est le point de mire de l'artillerie allemande. La cathédrale s'embrase. Le feu pénètre dans la nef par la grande rose qui se brise sous l'effet de la chaleur.
Le 19 septembre 1914, la tour nord couverte d’échafaudages est le point de mire de l’artillerie allemande. La cathédrale s’embrase. Le feu pénètre dans la nef par la grande rose qui se brise sous l’effet de la chaleur.
Transept et chœur. Celui-ci ne comporte que deux travées mais pour maintenir le maître autel à la place qu’il occupait jadis dans la cathédrale carolingienne, le chœur a été prolongé en empiétant sur quelques travées de la nef. Il était autrefois clôturé par un jubé ou était placé le trône royal lors des sacres. Dans le bras nord du transept une horloge astronomique du XVe siècle indique les phases de la lune. Photo © François Collombet

56 statues colossales de plus de 6 tonnes chacune

 Malgré les dettes qui s’accumulent (Innocent IV parle d’un fardeau qu’il faut supporter comme celui de sa propre mère l), les travaux du monumental portail occidental à trois étages avancent : on compte environ 530 statues. II faut mentionner le troisième étage et la magistrale galerie des rois, une rangée de statues colossales (56 statues hautes de 4,5 m, pesant plus de 6 tonnes chacune) où figure, au centre, le baptême de Clovis entre saint Rémi et sainte Clotilde. L’évêque tient dans la main droite la sainte ampoule apportée du ciel par une colombe. Elle contient les saintes huiles de l’onction royale. N’oublions pas non plus le portail latéral nord, avec sa remarquable série des évêques de Reims, et un peu plus loin le portail de gauche, avec un très beau tympan montrant un Jugement dernier. Quant aux deux tours, d’un gothique tardif, elles ont été édifiées en pleine guerre de Cent Ans.

Peinte en blanc et or

Le 17 juillet 1429, la cathédrale, pour ainsi dire achevée, peinte en blanc et or, voit le sacre et le couronnement triomphal de Charles VII conduit par Jeanne d’Arc. Le 23 juillet 1481, un poêle qui sert à la fonte du plomb provoque un nouvel incendie. Les dégâts sont considérables : la tour du transept est détruite, le plomb des charpentes coule le long des murs et se répand dans les rues. La chaleur est telle que onze cloches fondent. La restauration est extrêmement rapide, tant est grand l’émoi qu’a provoqué la catastrophe. Louis XI y consacre une partie des revenus de la gabelle et en 1500, tout est terminé.

Cathédrale de Reims, statue équestre de Jeanne d'Arc (Photo FC)
Cathédrale de Reims, statue équestre de Jeanne d’Arc sur le parvis de la cathédrale. Photo © François Collombet

Le 19 septembre 1914, le martyre d’une cathédrale

Reims étrangement épargné par la Révolution, subit de plein fouet la Première Guerre mondiale. Le 19 septembre 1914, la tour nord couverte d’échafaudages est le point de mire de l’artillerie allemande. La cathédrale s’embrase. Le feu pénètre dans la nef par la grande rose qui se brise sous l’effet de la chaleur. Comble d’ironie, il se propage à de la paille entassée contre les portails latéraux pour recevoir les blessés … allemands. Des témoins impuissants racontent avoir vu s’écouler par les gargouilles, les 400 tonnes de plomb en fusion de la toiture. La chaleur est telle que pierres et statues éclatent avant de s’effondrer. L’incendie sera circonscrit après plusieurs jours d’efforts, ne laissant qu’une carcasse noircie. Partis en fumée les combles, cette grande et belle charpente en chêne du XVIe siècle (2430 stères de bois), qu’on appelait avec fierté la « la forêt de Reims ». Mais ce n’est pas tout, cette cathédrale martyre devait recevoir le coup de grâce en 1917 puis en 1918, à quelques jours de l’armistice. Des obus de gros calibres (il en fut dénombré 300) percent sa voûte en cinq points. II faudra tout l’art des soldats du génie pour éviter l’effondrement de sa partie supérieure. À la fin de la guerre, la question se pose : faut-il laisser la cathédrale de Reims dans la tragique grandeur de ses ruines comme le témoin de la barbarie humaine ?

Le 19 septembre 1914, la cathédrale de Reims est incendiée
Le 19 septembre 1914, la cathédrale de Reims est incendiée

Henri Deneux, le sixième architecte et sauveur de Reims

Vingt ans seront nécessaires à sa restauration, financée en partie par des fondations américaines (Rockfeller, Ford, Carnegie). Son véritable sauveur qui mourut seul, oublié et dont les funérailles eurent lieu en 1969 dans une cathédrale quasi vide, fut l’architecte Henri Deneux. C’est lui le sixième architecte de la cathédrale de Reims. II en est nommé architecte en chef dès 1915. Aidé de sa femme, il accomplit un travail considérable. Tous les deux, à l’instar des loges maçonniques, occupent sous quelques tôles rouillées, deux minuscules pièces, face au chantier, à l’ombre de la cathédrale, dans les ruines du palais de Tau : « Je travaille, disait-il, en face de chez moi.»

Une charpente en ciment armé

Alors qu’est entrepris avec l’aide des prisonniers allemands, le déblaiement, un gros travail de classement et d’inventaire des débris commencent. Il durera plus de deux ans. Très rapidement se pose la question de la reconstitution de la charpente de la cathédrale. C’est le génie d’Henri Deneux qui impose une technique innovante en éléments de ciment armé, assemblé et démontable dont le principe fut initié en son temps par le grand architecte de la Renaissance, Philibert Delorme. Ainsi, de 1924-1926, l’architecte va-t-il reconstituer la charpente en éléments de ciment armé d’après ce procédé qu’il avait appliqué au préalable à la charpente de l’église Saint-Jacques de Reims. La toiture achevée est couverte de plomb, en replaçant la célèbre crête de fleurs de lys que la Révolution avait supprimée. Clocher à l’ange et carillon sont reconstitués. La galerie haute de la nef est remontée et les vitraux recomposés par le maître-verrier Jacques Simon d’après des calques exécutés autrefois par son père. On profite de cet immense chantier pour fouiller le passé et mettre à jour des fondations des édifices antérieurs jusqu’à des thermes romaines. On retrouve également nombres de tombeaux d’archevêques inhumés dans le chœur de la cathédrale carolingienne ainsi que le dallage du chœur qui avait été surélevé par les débris du jubé édifié par Collard de Givry et démoli en 1744. Henri Deneux réussit aussi à établir le plan de la première cathédrale attribuée à saint Nicaise et celui de la cathédrale d’Ebbon. La cathédrale de Reims est enfin reconsacrée par le cardinal Suhard, archevêque de Reims, le 18 octobre 1937 lors de cérémonies grandioses.

Marc Chagall et ses vitraux à Reims

“Pour moi, un vitrail représente la cloison transparente entre mon coeur et le coeur du monde. Le vitrail est exaltant, il lui faut de la gravité, de la passion. Il doit vivre à travers la lumière perçue. La lecture de la Bible est déjà la lumière, et le vitrail doit en manifester l’évidence par sa grâce et sa simplicité”. Marc Chagall.

L'ensemble des vitraux de cette chapelle a été réalisé en 1974 par Marc Chagall. Cette fenêtre centrale évoque les deux grandes figures de l'Ancien et du Nouveau Testament que furent Abraham et Jésus : le sacrifice d'Abraham, figure de celui du Christ, son alliance avec Dieu, sa filiation avec le Christ en croix qui accomplit le salut promis par Dieu. On aperçoit le Christ sortant vivant du tombeau, dans le rouge de la gloire (Photo FC) “Pour moi, un vitrail représente la cloison transparente entre mon coeur et le coeur du monde. Le vitrail est exaltant, il lui faut de la gravité, de la passion. Il doit vivre à travers la lumière perçue. La lecture de la Bible est déjà la lumière, et le vitrail doit en manifester l’évidence par sa grâce et sa simplicité”. Marc Chagall.
L’ensemble des vitraux de cette chapelle d’axe a été réalisé en 1974 par Marc Chagall. Cette fenêtre centrale évoque les deux grandes figures de l’Ancien et du Nouveau Testament que furent Abraham et Jésus : le sacrifice d’Abraham, figure de celui du Christ, son alliance avec Dieu, sa filiation avec le Christ en croix qui accomplit le salut promis par Dieu. On aperçoit le Christ sortant vivant du tombeau, dans le rouge de la gloire. Couvrant une surface d’environ 75m2, l’ensemble des verrières, hautes de 10 m, est réparti en six lancettes et trois rosaces. Il avait demandé à Charles Marq (maître-verrier, peintre et graveur) de lui restituer les couleurs, surtout les bleus anciens, afin de conserver l’harmonie du lieu. Photo © François Collombet

Statue de Jeanne d’Arc dans son habit de fleurs de lys dans une des chapelles du déambulatoire de la cathédrale. Cette chapelle Sainte Jeanne d’Arc (2015) est dotée de nouveaux vitraux (avec un spectre chromatique qui donne naissance à 27 couleurs) don de l’Allemagne à la France. Photo © François Collombet

De Gaulle et Adenauer, ces bâtisseurs de la paix et de la réconciliation

Le 8 juillet 1962, dix-sept ans après la Seconde Guerre mondiale et la signature à Reims du premier acte de capitulation de l’Allemagne, cette cathédrale bombardée en 1914, devenue monument martyr et symbole des atrocités allemandes fut le lieu de la réconciliation franco-allemande. Après avoir participé à un office religieux sous les voûtes séculaires de la cathédrale, Konrad Adenauer et Charles De Gaulle unis dans la même émotion, signaient l’acte de naissance du couple franco-allemand.

Le 8 juillet 1962 à Reims : de Gaulle et Adenauer scellent la réconciliation franco-allemande. Ils participèrent à un office religieux en la cathédrale de Reims, un symbole particulièrement fort. Bombardée en 1914, la cathédrale de Reims était en effet devenue un symbole des « atrocités allemandes » pendant la Première Guerre mondiale, un « monument martyr ». En outre, c’était à Reims que le premier acte de capitulation de l’Allemagne avait été signé, le 7 mai 1945.
Le 8 juillet 1962 à Reims : de Gaulle et Adenauer scellent la réconciliation franco-allemande. Ils participèrent à un office religieux en la cathédrale de Reims, un symbole particulièrement fort. Bombardée en 1914, la cathédrale de Reims était en effet devenue un symbole des « atrocités allemandes » pendant la Première Guerre mondiale, un « monument martyr ». En outre, c’était à Reims que le premier acte de capitulation de l’Allemagne avait été signé, le 7 mai 1945.

Palais du Tau, palais des archevêques de Reims

À l’ombre de Notre-Dame s’abrite le magnifique palais du Tau, palais des archevêques aujourd’hui musée et reconnu par l’Unesco comme faisant partie du patrimoine mondial. Le palais contemporain de la cathédrale a été détruit à la fin du XVIIe siècle, victime de la nouvelle mode et de la munificence de son archevêque, Charles-Maurice Le Tellier, l’un des courtisans de Louis XIV et frère du ministre de la Guerre, Louvois. II a fort heureusement gardé la chapelle privée, du XIIIe siècle, et une partie de la fameuse salle du Tau, celle où avait lieu le banquet des rois de France lors des cérémonies du sacre.

L’un des plus beaux musées lapidaires de France

Tau est intimement lié à la cathédrale de Reims et à son décor sculpté. Il fallut près de 30 ans après la Seconde Guerre mondiale pour achever ce qui fut une restauration titanesque et faire de cet ancien palais épiscopal à l’état de ruine, un extraordinaire musée destiné en priorité à la statuaire déposée de la cathédrale de Reims. Ainsi, par exemple fallut-il adapter l’édifice pour entreposer certaines pièces comme la salle du Goliath avec ses 10 m de hauteur destinée aux plus grandes pièces de la collection (statue de Goliath de 5,40 m) ou bien cette œuvre très lourde qu’est le couronnement de la Vierge qui pèse 24 tonnes.

Chevet de la cathédrale de Reims, place Henri Deneux. Il s’agit d’un très bel exemple d'art gothique avec les arcs-boutants, qui rejoignent les pilastres à l'extérieur en soutenant la voute. A gauche, l'ancien palais des archevêques (de style classique), le palais du Tau, avec sa chapelle gothique pourvue, elle, de contreforts (Photo FC)
Chevet de la cathédrale de Reims bordé par le Jardin Henri Deneux. Il s’agit d’un très bel exemple d’art gothique avec les arcs-boutants, qui rejoignent les pilastres à l’extérieur en soutenant la voute. A gauche, se trouve l’ancien palais des archevêques (de style classique), le palais du Tau, avec sa chapelle gothique pourvue, elle, de contreforts. Photo © François Collombet

Reims, cette cathédrale de tous les records

Reims commencée en 1211 a une hauteur sous voûte de 38 m.

Longueurs : Extérieure : 149 m / Intérieure : 139 m / nef : 115 m

Largeurs : Extérieure : 34 m / Intérieure : 30 m / Extérieure au transept : 61 m / Intérieure au transept : 49,5 m / De la nef (axe des piliers) : 14,65 m / Des bas-côtés : 7,75 m

Hauteurs : Des tours : 83 m / Du clocher à l’ange (chevet) : 87 m / De la voûte de la nef sous clef : 38 m / Des voûtes des bas-côtés : 16,40 m

Superficies : Hors œuvre : 6 650 m2 / Dans l’œuvre : 4 800 m2

Nombre de statues : 2303 statues (dont 211 de 3 à 4 m de hauteur). Beaucoup de ces statues sont exposées au palais du Tau.

Patrick Demouy, l’historien de la cathédrale de Reims

Il est l’auteur de nombreux ouvrages sur Reims dont : Notre-Dame de Reims, la cathédrale royale (1986), Un portail pour le ciel (1996), Notre-Dame de Reims, sanctuaire de la monarchie sacrée ((1996)

Patrick Demouy nous guide dans ce chef d’œuvre de l’art gothique. Il est entre autres, auteur de Cathédrale de Reims aux Presses de l'Université Paris-Sorbonne et du Sacre du roi aux éditions La Nuée Bleue. Patrick Demouy, professeur à l’Université de Reims et à l’Institut catholique de Paris a consacré sa vie à Reims et à son histoire, à la cathédrale et au Palais de Tau en particulier (Photo FC)
Patrick Demouy nous guide dans ce chef d’œuvre de l’art gothique. Il est l’auteur de nombreux ouvrages dont : “Cathédrale de Reims” aux Presses de l’Université Paris-Sorbonne et “Sacre du roi” aux éditions La Nuée Bleue. Patrick Demouy fut professeur à l’Université de Reims et à l’Institut catholique de Paris. Il a consacré sa vie à Reims et à son histoire, à la cathédrale et au Palais de Tau en particulier. Par ailleurs, il est l’auteur de nombreux travaux sur l’histoire de la vigne et du vin de Champagne. Photo © François Collombet